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Comme Beyrouth. Sept fois détruite, sept fois reconstruite. Elle porte en elle sept âmes superposées. Toujours belle et vivante. Princesse éternelle de la Méditerranée, Beyrouth étreint les offrandes déposées sur ses paumes et murmure «jamais je ne vous abandonnerai mes enfants». La guerre n’a pu l’effacer tout comme elle n’a pu ôter les images flottantes de notre maison détruite quelques jours avant le décès de mon frère. Tout a été reconstruit et revenu, sauf lui, Gorguis. Nos murs ont été érigés avec les débris de ses souvenirs. Ensemble, mes frères et moi avions cueilli ses éclats de rire un par un, jour après jour, pour décorer avec ces bouquets nos chambres et embellir nos soirées nostalgiques. Dans les abris, je passais mon temps à dessiner avec les mots, son visage embrouillé et ma ville déchirée par les cris des bombes et des vagues affolées.
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Leila Gorguis